Vilains, gentils

La vie n’est pas idéalisée comme dans les histoires qu’on nous racontait, gamin. La vie est une vieille mégère qui peut s’avérer un peu trop revêche lorsqu’on la domine un peu trop à son goût. L’extase et le bonheur, avec elle, sont deux choses qui ont une durée bien limitée qui demandent à ce qu’on se batte pour les conserver. Dans mon monde à moi, les gentils auraient le dessus sur les méchants et tout le monde vivrait heureux. La réalité, quant à elle, me laisse entendre que c’est beau de rêver, mais que si je m’accroche à une telle idée faudrait peut-être me mettre à lire puisqu’il n’y a qu’au travers du papier que je trouverai une telle vision de la vie. On finit par se dire que les films et les bouquins nous montrent que ce que nous voulons bien voir. On enferme nos espoirs et nos bonnes volontés dans des histoires préconçues qui se terminent sur des fins prévisibles avec beaucoup d’enfants; ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. Lorsqu’on ouvre nos yeux, on se rend compte que si c’était le reflet de la vie, alors tout serait autrement. Peach ne se serait pas fait kidnapper, mais elle tromperait plutôt Mario en baisant avec Bowser. Zelda se taperait Ganondorf dans un vieux cachot de son château sans se soucier de Link; pas la moindre seconde. Jasmine se foutrait bien de la gueule d’Aladin puisque ce n’est qu’un voleur vagabondant dans les rues. La Belle n’aurait jamais vu au-delà de la repoussante apparence de la Bête. Les histoires de nos jours ressembleraient davantage à celles qui nous ont précédés; chez les Grecs et les Romains. C’est dans les recoins des légendes de la mythologie que notre société s’est orientée et a forgé son caractère. On y parle d’amours impossibles qui forment le triangle angulaire des prises de tête humaines. Il n’est pas rare que certaines histoires s’enlisent dans de grands suicides comme avec Antigone qui préféra n’en faire qu’à sa tête et devant sa mort, son amoureux s’est enlevé la vie. La femme est une femme de caractère qui n’a rien à voir avec l’image qu’on se fait de Blanche-Neige, mais bien plutôt celle d’une femme qui hache à la main se présente sous le nom de Clytemnestre. Les garçons s’enveniment la vie, afin de ne pas ressembler aux barbares qui peuplent le désert, tentant par tous les moyens d’agir selon un code éthique. Les gentlemen’s sont en voie de disparition, car à force de se faire retourner; ils ont tourné les talons pour de bon et ont abandonné le navire. Les filles contemporaines nous mettent sur la corde raide pour, au dernier instant, nous jeter dans le vide où on finit tôt ou tard par heurter le sol. Elles aiment mieux les rebelles, ces pauvres types qui les traiteront aussi bien qu’une vieille consigne de Coke ramassée par terre qu’on finit tôt ou tard par jeter à la poubelle pour s’en débarrasser. Semblerait-il qu’un jour elles réaliseront que ce n’est pas un vilain qui leurs faut, mais un gentil; faudrait les aviser de se décider parce qu’un jour on va se tanner de poiroter. Pour l’instant, les garçons qui forment un peu la guilde des héros œuvrent dans l’ombre, comme les vrais super-héros sans remerciement pour la simple gratification de faire ce qui semble bon et juste pour une personne qui leur tient réellement à cœur. On aurait bien beau s’enflammer et crier haut et fort qu’on nous regarderait comme des aliénés; nous jugeant. Donc, on se ferme la gueule et on œuvre dans le secret quand bien souvent ce sont les vilains qui se ramassent la majorité des mérites. Il y a de ces instants qui t’accrochent à ton rôle de gentil; jamais très concret ni très compréhensible, mais pour toi, ça forme ce qui te maintient dans la lumière. On dira ce qu’on voudra, mais les bons gars ne changeront pas malgré tout; l’espoir nous promet d’un jour tomber sur la bonne.